Série Japon: Nodaiwa, le spécialiste de l’anguille à Tokyo

8 sept

- On ne me donne pas grand-chose, mais enfin, cela me permet de manger de l'anguille de temps à autre. Nakata aime bien l'anguille.
- Moi aussi, j'aime bien l'anguille. J'en ai mangé une seule fois, il y a longtemps. A vrai dire, je ne me rappelle plus trop quel goût que ça avait...
- C'est vraiment bon. Ça ne ressemble à rien d'autre. On peut toujours remplacer un aliment par un autre, mais en ce qui concerne l'anguille, rien ne peut en égaler le goût.

Kafka sur le rivage - Haruki Murakami

 

Une fois n'est pas coutume, nous revenons dans le quartier de Roppongi. Objectif, le restaurant Nodaiwa. On y sert ce qui est considéré par beaucoup comme la meilleure anguille (unagi) de Tokyo. Je ne vais pas m'étendre sur ce plat adoré par les japonais. Pour avoir tout le détail, je vous recommande l'article consacré sur le blog "Le Manger" qui en parle de façon complète.

Ici, il suffira de dire que ce poisson aux allures de serpent se cuisine le plus souvent à la braise enrobé d'une sauce au bouillon d'anguille, mirin, soja et sucre. Le résultat est un délicieux filet à la saveur délicate sublimé d'arômes de grillade et de caramel. Ce plat appelé kabayaki est la manière par défaut de préparer l'unagi. Et c'est pas moi qui vais m'en plaindre puisque je ne suis pas le plus grand partisan des poissons peu assaisonnés. On vous dira que c'est pour laisser le goût subtil du poisson s'exprimer, m'voyez. Un petit filet poché au bouillon doux arrosé d'un filet d'huile d'olive extra extra vierge ?

deception

Fous-moi ça dans la braise! Oui, le poisson peut aussi être gourmand comme en témoignent nombre de méthodes et de préparations indiennes ou asiatiques.

Pour ce délice des cieux, le tokyoïte, en bon gourmet qu'il est, est prêt à faire la queue aussi longtemps qu'il le faudra. Malgré le très grand nombre de restaurants disponibles, c'est toujours révélateur de voir les gens attendre tranquillement devant les meilleurs en avançant de chaise en chaise jusqu'à ce que leur tour arrive. Le resto voisin peut bien être vide, il faut aller là où c'est bon, quitte à attendre. Ce respect du bon travail tire inévitablement le niveau moyen vers le haut en récompensant les meilleures adresses. Une leçon à retenir.

nodaiwa-attente

En ce mois de décembre, le hall est froid malgré le petit seau rempli de braises déposé dans un coin de la pièce. On reste en veste en attendant patiemment notre tour. Le bel intérieur boisé, qui évoque une maison de maître, exhale l'histoire d'une adresse qui n'a plus rien à prouver depuis longtemps. Cela fait plus de 200 ans que de l'unagi est préparée en ces lieux. Juste le temps de maîtriser un minimum son affaire.

Lorsque notre tour arrive, une petite dame très affairée en kimono - il y a un grand nombre de petites dames affairées au Japon - nous demande de la suivre. À notre grande surprise, nous nous retrouvons dans la rue pour une petite ballade jusqu'au second établissement de l'enseigne. Une scène improbable qui ajoute encore du charme à l'expérience. Ou serait-ce un piège?

En route pour le Nodaiwa

Une fois installés dans cette annexe, nous pouvons enfin commander notre unaju. L'unaju, c'est la belle boîte laquée dans laquelle on sert l'anguille sur un lit de riz. Le client peut choisir la quantité de poisson qu'il souhaite. Selon sa faim et sa gourmandise, le prix pourra monter de façon impressionnante. En principe, 1 ou 2 filets suffisent.

nodaiwa-menu-unaju

Ce plat est souvent servi très caramélisé, voire un peu carbonisé dans les gargotes modestes. Ce n'est pas le cas au Nodaiwa où la cuisson est faite avec délicatesse et la marinade utilisée avec parcimonie afin de préserver l'équilibre des saveurs. En goûtant cette préparation tout bonnement délicieuse, on comprend soudain pourquoi la carte prévoit des portions pouvant aller jusqu'à près d'un demi kilo. La chair du poisson, le gras de la peau, le sucré de la marinade et le bon riz se combinent pour donner lieu à un de ces moments de félicité qui ne peut être que le fruit de plusieurs années dédiées à la perfection de l'art culinaire. Le plat se savoure miette après miette. Je rejoins ainsi les armées de japonais qui ont élu cette préparation meilleur poisson cuit existant.

L'unagi est une spécialité moins connue qui mérite pourtant toute sa place dans le panthéon des belles créations nippones. Si vous avez la chance d'en faire l'expérience au Nodaiwa vous la goûterez sous son meilleur jour et dans un cadre que plus authentique tu meurs.  En partant, on sera encore surpris de recevoir un joli tissu à motif pour passer la poussière. Un cadeau de remerciement, peut-être pour vous souhaiter bonne route.

Avant de vous laisser à vos viles occupations occidentales, j'ai un dernier secret à vous donner: Même pas besoin d'aller à l'autre bout du monde pour goûter à cette cuisine exceptionnelle. Nodaiwa a une antenne à Paris!

 

Nodaiwa
1-5-4 Higashi-Azabu,
Minato-ku,
Tokyo 106-0044
+81 3 3583 7852

7 Responses to “Série Japon: Nodaiwa, le spécialiste de l’anguille à Tokyo”

  1. Fabio septembre 8, 2014 at 20:52 #

    Ca à l'air cool. Tu n'a pas la recette par hasard? Parce que c'est un peu loin tout de même.

    • Lukas Menal septembre 9, 2014 at 09:57 #

      Tu trouveras tout ici: http://www.lemanger.fr/index.php/unagi-languille-japonaise/

  2. Manuel septembre 8, 2014 at 21:14 #

    Ah l'unagi!
    Quel dommage que ce poisson à l'état cru soit tout à fait introuvable par chez nous. On trouve de bons produits mais sans doute jamais qui n'égalent les saveurs de ce poisson quand il est frais.

    • Baba septembre 11, 2014 at 10:29 #

      attention à la préparation de l'Unagi fraîche car peut-être dangereuse sans les connaissances nécessaire due à la toxicité de son sang.

  3. kwtran septembre 8, 2014 at 23:06 #

    Introuvable, je n'en suis pas sur Manuel, il doit être possible d'en trouver mais via une filière professionnelle.

    j'en avais commandé des vivantes d'Italie en 2008, elles étaient délicieuses, tuées de manières traditionnelles par mon chef :/

  4. La semaine d'une gourmette septembre 9, 2014 at 09:16 #

    Ah, j'adore ! As-tu mangé l'anguille proposée par le Kazoku à Lausanne ? Elle est excellente !

    • Lukas Menal septembre 9, 2014 at 09:59 #

      Non, je n'ai malheureusement pas goûté. Ça fait partie des nombreux mets que je veux encore essayer chez eux!

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