C’est en explorant la Halle Romande que je suis tombé sur ces drôles de bouteilles. Leur forme évoque une recette de grand-mère. L’étiquette joue le minimalisme et porte haut les couleurs de la Suisse. « Opaline, encore une de ces start-up qui veut se donner un genre. Tiens, poire et verveine, c’est original ça. » Je sors avec ma mignonne petite bouteille et prends une lampée de ce qui est probablement le meilleur jus que j’aie bu de ma vie. Vous emballez pas, je suis pas trop copain avec les fruits et loin d’avoir exploré ce territoire en profondeur. En l’état, c’est déjà une belle victoire pour Opaline de m’avoir fait adorer un jus de fruit.

Bon, la poire, c’est un des mes fruits préférés. Mais ici, elle est en plus délicatement infusée à la verveine pour un résultat qui oscille entre douceur, fraîcheur absolue et pur plaisir. Une baffe inattendue.

Trop de nouvelles entreprises de bouche commettent l’erreur de faire passer l’éthique avant le goût. Elles sur-communiquent sur leur engagement et se mettent à vendre des idées, voire des programmes politiques au lieu de se concentrer sur leur cœur de métier. Chez Opaline, la démarche est engagée, certes, mais c’est bien la nécessité de créer un produit de haute qualité qui dicte la politique « responsable » (je n’aime pas beaucoup le terme) de la boîte. Pour faire de bons jus, il faut de bons fruits.

Basée à Orsières en Valais, Opaline existe depuis 2011 et se fournit principalement auprès de producteurs romands. Il y a néanmoins des exceptions qui sont, je vous rassure, tout à fait justifiées. Le jus de tomate est provençal, par exemple. Un petit coup de tequila avec ça et hop, c’est parti pour un dimanche matin gourmet et festif.

Plus impressionnant, les collaborateurs ont l’opportunité de rentrer dans le capital de l’entreprise pour être, eux aussi, propriétaires d’une partie de l’organisation. On ne sera pas étonné de savoir que cet engagement pour un modèle d’affaire exemplaire a été récompensé par le Prix Suisse de l’Ethique 2014.

Y a pas à dire, j’aime bien cette marque. Je n’arrive même pas à m’agacer du fait qu’ils appellent leurs jus « grand crus », parce que, en un certain sens, c’est bien de ça qu’il s’agit.

Plus tard, j’ai pu goûter un grand nombre de leurs créations grâce à un pack dégustation que l’entreprise m’a gracieusement offert. Je mets un peu d’eau dans mon jus, aucune n’est aussi merveilleuse que mon fameux poire-verveine. Mais toutes sont excellentes. Les fruits sont traçables au producteur près et on sent que chaque recette a été mûrement mise au point. Vous croyez que j’exagère? Essayez et vous verrez. J’apprécie en particulier la douceur de la plupart de ces préparations. Elles enrobent vos papilles plutôt que de les surexciter avec une trop grande concentration de sucre ou d’acidité. Je vois aussi ce produit comme une réponse au smoothie, épais et lourdingue, qui commencent gentiment à nous sortir par les trous de nez.

Ces grands crus -puisque nous avons décidé qu’ils méritaient leur appellation marketing- sont suffisamment variés pour satisfaire tous les goûts: Pur fruit (pomme-framboise, pomme-poire), fruit et légume (pomme-carotte ou pomme-betterave) ou combinaison infusée (poire-verveine, pomme-mélisse). On remarque la surreprésentation logique des fruits à pépins typiquement locaux. Valais oblige, le nectar d’abricot de Saxon, additionné d’un peu de sucre et d’eau de source, répond également présent.

Evidemment, ces jus se négocient au prix fort et ça risque d’être difficile d’en faire votre boisson du matin. La bouteille de 25 cl. atteint vite les 3.50 CHF mais on peut économiser en achetant les grands formats (autour de 7.50 CHF / L.). Des boissons à considérer comme un produit d’exception qui trouveront leur place comme boisson d’agrément et en tant que petit plaisir occasionnel. Elles ouvrent également la porte à une profusion de cocktails qui devraient laisser vos invités pantois.

Pour vous procurer ces ambroisies, il faudra vous rendre chez Manor ou dans la plupart des épiceries haut de gamme, en ligne ou non.