Duchessa: le food center italien ultra-moderne
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J’ai récemment répondu aux questions d’une journaliste en train d’écrire un article sur les nouveaux concepts de restaurants. Pour faire court, elle constatait qu’il devenait de plus en plus rare de voir des ouvertures sans qu’une identité très forte y soit attachée. Locavore, mono-maniaque, ultra-branchée, la table fraîchement sortie de l’oeuf se doit d’être pensée de A à Z. Evidemment, je suis tout à fait d’accord avec ce constat. On peut s’en réjouir ou le déplorer, mais la réalité du marché est là. Et justement, Duchessa est un établissement en droite ligne de cette tendance, presque jusqu’à la caricature.
Osteria 2.0
C’est à la fois un restaurant et une épicerie haut de gamme sur le thème de l’Italie. Comme si ça ne suffisait pas, le lieu se veut aussi futuriste. On y a donc ajouté un obscur système robotisé de gestion de vos courses. Dans les grandes lignes, vous pouvez faire déposer vos emplettes dans un panier sur rail qui conservera et transportera vos produits jusqu’à la sortie du magasin. Au restaurant, les menus vous sont présentés sur écrans tactiles. Comment y échapper? Pour finir, une carte électronique vous permet de faire vos petites commissions de gourmet, puis de déjeuner tranquillement pour finalement payer au comptoir placé devant la sortie. Une idée qu’on avait déjà pu tester, sans être trop convaincu, chez Vapiano. Duchessa est situé dans la surface commerciale moderne i.LIFE d’Etoy. Comme le démontrent les deux autres emplacements de l’enseigne, à Gstaad et Genève, l’idée est d’attirer des ménages à fort pouvoir d’achat et avides de produits de qualité.
Le cadre est donc ultra-contemporain et chic à la fois. Une salle centrale héberge une cuisine ouverte autour de laquelle se répartissent les tables à manger ainsi qu’un bar avec vue sur la brigade. Aucun doute sur le fait que l’équipe en cuisine est italienne puisqu’on peut profiter de leurs échanges en plein coup de feu. Cela ne va d’ailleurs pas sans heurts. Le jour de ma visite, le staff réglait ses comptes au sujet d’un dysfonctionnement quelconque. C’est le piège de la cuisine intégrée à la salle: aucune tension n’échappe à la clientèle attentive. Pour moi, ça ne fait qu’ajouter le plaisir de l’observation à celui de la dégustation, mais pour manger peinard, on repassera.
Autre défaut des cuisines impudiques, on observe les cuisiniers ouvrir les sachets de plastique qui contiennent les sauces ou l’osso-buco. Mais ne vous formalisez pas, car peu est sacrifié à la qualité. C’est surtout une question d’organisation et la majorité semble faite maison, en avance. Les produits sont plutôt de bonne facture et les pasta sont cuites puis poêlées minute dans les règles de l’art. Malgré les ajustements qui semblent nécessaires dans l’organisation du service, la machine reste donc bien huilée et c’est un vrai bonheur de voir les cuisiniers faire sauter les tagliolini dans leurs belles poêles cuivrées.
Une table italienne qui s’en tire bien
Et quoi de plus typique que des Tagliolini cacio e pepe (28 CHF) ? La cuisson est parfaitement al dente alors que la sauce recèle un puissant goût de fromage. En revanche, le poivre se fait bien trop discret. La marque d’une modernité qui ne veut brusquer personne? Peut-être bien. Le poivrier mis à disposition est un gadget et ne s’avère pas suffisamment pratique pour permettre de corriger ça facilement. Je savoure la vue sur une riche américaine qui s’agite de longues et gênantes secondes alors qu’elle s’échine à faire sortir plus de quelques particules d’épice de cet engin démoniaque. Parmi les règles à ne pas briser en restauration, il s’en trouve une qui a trait au poivrier: n’essayez pas de jouer les originaux en vous équipant d’autre chose que d’un poivrier Peugeot classique. Pour la petite histoire, il y en avait un magnifique à disposition des cuisiniers qui, eux, ne s’y trompent pas. Bon sens, où es-tu?
Malheureusement, ce n’est pas la seule déception. Alors qu’on voit passer avec envie les assiettes de tagliolini garnies de tuiles de parmesan, la mienne en est désespérément dépourvue. Il faut croire que c’est vraiment le stress aujourd’hui. Bon, ce cacio e pepe est probablement un des plus chers du monde mais il faut reconnaître qu’il est bon.
Nous prenons quelques légumes grillés (16 CHF) en guise d’accompagnement. J’en vois derrière qui s’énervent comme quoi c’est les antipasti et qu’il faut absoluement les manger en premier. C’est le monde moderne je vous rappelle! Ici, on vit à deux cents à l’heure avec des wagonnets-robots remplis de sauce tomate qui filent à travers les allées. On a pas le temps pour ces conneries Slow Food. Il n’empêche qu’avec leur pesto un peu timide, ces légumes sont plaisants sans être bouleversants. Leur prix, c’est l’inverse.
Les Tagliolini aux fruits de mer (27 CHF) en proposition du jour sont fort goûteux. En amateur, j’apprécie particulièrement la belle portion de moules charnues. La sauce tomate se révèle consistante et bien loin des coulis décevants qu’on trouve parfois. Il y des herbettes et du plaisir dans cette assiette parfaite pour prendre des forces avant une session de shopping.
En plus des pâtes, le menu regorge de spécialités qui rivalisent d’authenticité pour séduire les puristes. Pizzas, belles salades, mozzarella, burrata, escalopes milanaises, charcuteries et fromages sont autant de tentations auxquelles vous pourrez succomber si le cœur vous en dit. Après ça, vous serez paré à faire vos achats
Un marché italien bien tentant
Puisqu’on en parle, la partie épicerie propose une large gamme de sauces, légumes marinés, poissons en boîtes et autres pesto divers qui devraient vous tenir en haleine un bon moment. C’est aussi ici que vous trouverez une riche palette de vins, y compris de prestige. Et faut-il mentionner l’immense choix de pâtes?
Le rayon charcuterie et fromagerie est impressionnant. Impossible de compter les trancheuse Berkel d’un seul coup d’œil, il y en a trop! Vous avez la possibilité de goûter et les produits son bien visibles. Pour donner du cachet et du chic à l’expérience, Duchessa mise sur un service à la coupe.
Si vous aimez les trucs plus authentiques et populaires, vous serez probablement un peu perturbé par l’aspect aseptisé de lieu. Là où un marché est bruyant, un peu sale, et bordélique, Duchessa est hygiéniste, au carré, et un peu trop calme. Ça n’empêche pas de faire ses achats en toute sérénité mais ça enlève passablement de la joie de l’activité. Autre regret, pas de produits frais que ce soit au niveau de la viande, du poisson ou des légumes. Du coup, vous serez obligé d’aller ailleurs pour ces ingrédients pourtant essentiels. Le concept s’avère donc plus un détour pour le plaisir qu’une véritable proposition complète.
Il suffit de regarder les lieux où Duchessa s’est installé pour comprendre que la chaîne vise une clientèle très aisée, apatride sur les bords (on entend beaucoup d’anglais) et qui aime le chemins biens balisés. Ce n’est pas un mal mais, avant d’y aller, il faut juste savoir que c’est pas le centre italien ou la pizzeria du coin. Au final, j’avoue être moyennement convaincu par cette manière de vouloir trop en faire sur la technologie et le luxe ostentatoire. Je m’arrêterai volontiers à la prochaine occasion parce que c’est bon, qu’il y a de jolis produits et que l’endroit est globalement plaisant. Mais de là à en faire une adresse à privilégier, ça risque d’être plus compliqué. Où est l’âme?
1163 Étoy
Tel: + 41 21 807 17 27
Site Internet
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Non mais les prix, je rêve ! Des cacio e pepe à 28 francs, j’en reste bouche bée. Si en plus ils te les ont amenés incomplets… tu as réclamé, j’espère ?
Bref, il y a assez de très bon restaus italiens à Lausanne pour ne pas aller se fourvoyer là-dedans, dirais-je.
c est trop cher
Je trouve des excellentes spécialités italiennes de super fromages et me rend régulièrement à cette épicerie !